Évasion #013

« Mais il y avait certainement des ouvrages spéciaux que je n’avais jamais eu la curiosité de consulter. Là, peut-être, j’aurais trouvé des récits d’évasion. J’aurais appris que dans un cas ou moins la roue s’était arrêtée, que dans cette préméditation irrésistible, le hasard et la chance, une fois seulement, avaient changé quelque chose. Une fois ! Dans un sens, je crois que cela m’aurait suffi. Mon cœur aurait fait le reste. Les journaux parlaient souvent d’une dette qui était due à la société. Il fallait, selon eux, la payer. Mais cela ne parle pas à l’imagination. Ce qui comptait, c’était la possibilité d’évasion, un saut hors du rite implacable, une course à la folie qui offrit toutes les chances de l’espoir. »

  • Albert Camus. L’Étranger. Paris : Gallimard, 1942. Edition Folio, p. 164